La commission des Affaires économiques du Parlement européen a voté aujourd’hui à une très large majorité le rapport Maurel sur la lutte contre les montages d’optimisation fiscale agressive. Cette initiative majeure, portée dans la directive de coopération administrative, est la principale réponse de l’Union européenne aux scandales des Panama Papers et des Paradise Papers. En encadrant les activités des intermédiaires fiscaux,en lest soummettant à une obligation de reporting, elle s’attaque à tous ceux qui promeuvent, facilitent la planification agressive, et en un mot permettent d’échapper à l’impôt. La négociation a montré qu’il y a bon espoir d’obtenir un résultat semblable en plénière, ce qui représenterait une copie sans fautes du Parlement européen.
Il existe une véritable industrie de l’optimisation fiscale : ces pratiques doivent observer la loi
Appleby, Mossack Fonseca, ces noms qui ont atterri sous le feu des projecteurs en raison des scandales sont ceux de cabinets d’avocats, cabinets de conseils, experts fiscalistes, et autres professions engagées dans l’optimisation fiscale. C’est la partie immergée de l’iceberg, mais il existe une véritable industrie de l’optimisation fiscale, composée de ces intermédiaires fiscaux. Il n’y a aucune raison pour que leurs pratiques n’observent pas la loi. La criminalité en col blanc a été trop longtemps tolérée par les autorités publiques. Le rapport Maurel établit donc un périmètre large : non seulement tous les intermédiaires fiscaux, mais aussi tous les grands cabinets d’audits, devraient être obligés de notifier à l’administration fiscale les montages d’optimisation qu’ils conçoivent ou qu’ils vendent. Pour qu’un montage soit notifié, il suffit qu’il remplisse 1 seul des critères d’une longue liste d’indices d’optimisation agressive que le rapporteur a gardé large, et ouverte.
Tous les montages illégaux doivent être démantelés
Le projet de réforme déposé par la Commission sur la table du Parlement européen ne concernait que les montages futurs. En somme, on laissait dormir et fonctionner tous les dispositifs d’évasion fiscale et d’optimisation fiscale agressive qui étaient toujours en vigueur. Emmanuel Maurel a obtenu que la directive soit étendue à l’ensemble des montages toujours en vigueur. La fuite des profits, l’évitement de l’impôt, ne sont pas nouvelles. Si l’on veut lutter efficacement contre ce fléau pour les recettes publiques, il faut s’attaquer non seulement au flux, mais aussi au stock ! Oui, cela demande un peu d’ambition, car cela représente un travail important pour les administrations fiscales, mais le Parlement européen a mis en garde à de plusieurs reprises les États membres contre les coupes austéritaires dans les ressources humaines et techniques de ces administrations.
Le conseil porte la responsabilité de l’impunité fiscale
Pour la seconde fois consécutive, Emmanuel Maurel est rapporteur d’une réforme de la directive de coopération administrative, à chaque fois pour une meilleure lutte contre l’optimisation fiscale ; et pour la seconde fois, nous nous attendons à une position médiocre du Conseil, qui passe outre les recommandations du Parlement. Les Etats membres sont seuls maîtres en matière de fiscalité, et M. Maurel regrette qu’ils s’arrêtent au milieu du gué. Le Parlement européen avance de concert avec la société civile, ainsi, le législateur est en phase avec les besoins des finances publiques et les attentes citoyennes d’égalité. Aujourd’hui la commission des affaires économiques, demain l’assemblée plénière : une feuille de route ambitieuse pour répondre aux scandales fiscaux est proposée aux gouvernements européens. Face aux maigres chances qu’ils en tiennent compte, la presse, la société civile, l’opinion publique, sont seules en mesure de pousser plus avant cet agenda en élevant la voix dans ce sens.