Depuis 1975, l’UE accorde un accès total, sans droit de douane, à son marché pour les produits originaires de la région ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). Mais l’OMC a jugé ces préférences unilatérales illégales et a invité l’UE à négocier des « Accords de partenariat économique » (APE) régionaux, notamment avec la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest, qui réunit 16 États.
Problème pour la Commission européenne : l’APE qu’elle a conclu avec les pays d’Afrique de l’Ouest n’a pas encore été signé du fait de l’opposition de trois États de la région – le Nigéria, la Gambie et la Mauritanie – inquiets de l’effet déstabilisateur de cet accord sur les marchés locaux. Un grand mouvement « Stop APE » a d’ailleurs émergé dans la société civile ouest-africaine, notamment au Sénégal.
Ignorant ces saines réserves, la Commission a pris des mesures radicales afin que les APE soient ratifiés avant le 1er octobre, une date fixée de manière arbitraire et qui ne constitue pas une exigence de l’OMC. Le Ghana se retrouve ainsi dans la situation, ubuesque, où le pays est menacé de perdre ses préférences commerciales, du fait des réticences (qui plus est, légitimes) du Nigéria, de la Gambie et de la Mauritanie.
C’est ainsi que le parlement ghanéen a été contraint de ratifier, dans l’urgence, un Accord de partenariat économique « intérimaire » (c’est-à-dire, si on lit entre les lignes, désuet et imparfait) dont la négociation remonte à 2007-2008, soit avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne et avant la mise en œuvre du Tarif extérieur commun (TEC) de la région ouest-africaine. Une absurdité !
Ce n’est clairement pas le type d’accord que les socialistes européens souhaitent pour l’Afrique : l’APE intérimaire – en introduisant des règles divergentes entre les pays – fragiliserait l’entreprise d’intégration régionale de la zone ; il promeut mollement les droits de l’homme et ne prévoit pas de schéma d’implication de la société civile ; il prévoit une ouverture de marché trop importante côté ghanéen, dont, notamment, une ouverture totale du marché de la poudre de lait.
Contrairement à l’administration américaine (qui a maintenu ses préférences commerciales vis-à-vis du Ghana jusqu’en 2025), la Commission européenne fait malheureusement la preuve de son absence de vision stratégique et de son déficit d’innovation idéologique. C’est pour cette raison que les socialistes européens, en symbiose avec les autres groupes de la gauche européenne, ont rejeté l’APE UE-Ghana – qui a malgré tout été validé par une majorité du Parlement.