Le Parlement européen a approuvé le 08 juin, l’octroi à la Tunisie d’un prêt de 500 millions d’euros qui doit l’aider à consolider ses mécanismes démocratiques et à redresser son économie très éprouvée, en échange de réformes structurelles.
En marge du vote sur ce prêt, s’est déroulé un débat au sein de la Commission du commerce international du parlement européen sur la situation tunisienne.
Des réformes structurelles à mettre en oeuvre
Pour le député et ancien Premier ministre finlandais, Jyrki Katainen, « la situation est très grave » en Tunisie. Selon lui: » La Tunisie est confrontée aux conséquences des attentats terroristes de 2015. Le résultat est que son secteur touristique, vital, a été particulièrement affecté et les investissements étrangers ont fortement diminué. Ces évolutions ont conduit à une baisse des taux de croissance et les réserves en devises étrangères » a t-il indiqué.
Si ce prêt pourra aider la Tunisie, celui-là ne devra pas se faire sans conditions: « Bien sûr, la nouvelle opération de l’Assistance Macrofinancière (AMF) sera subordonnée à la réalisation d’un certain nombre de conditions de politique économique. En effet, la Tunisie doit mettre en œuvre le nouveau programme du FMI et satisfaire les conditions de politique économique et financière à convenir entre l’UE et la Tunisie dans un protocole d’accord » avait indiqué l’ancien Premier ministre finlandais.
Du côté du député italien Salvatore Cicu, c’est le même son de cloche: » Il y a le gros problème des réformes structurelles dont la Tunisie a besoin » a-t-il indiqué rappelant que la Tunisie a besoin de 5 milliards d’euros et pas seulement de 500 millions d’euros.
Quant au député socialiste français Emmanuel Maurel, il appelle « à une grande flexibilité, à une intelligence » quant aux réformes structurelles à entreprendre en Tunisie « parce qu’il ne s’agit pas non plus d’étouffer complètement l’économie tunisienne » a t-il affirmé.
Si une assistance macrofinancière est nécessaire affirme Sander Loones, député belge, il ne faut donner « de chèques en blanc » à la Tunisie: « Nous demandons avant que quelque chose se fasse pour le pays (la Tunisie): de profondes réformes pour la croissance, l’emploi et la stabilité financière », a-t-il déclaré.
Pour le député français et directeur du journal l’Humanité, Patrick Le Hyaric, cette assistance macrofinancière « ne peut se faire aux vieilles conditions du Fonds monétaire international, qui aggravent l’endettement et réduisent la souveraineté populaire ».
Repenser la dette tunisienne
Pour le député Emmanuel Maurel, « on parle d’AMF, mais qui dit AMF, dit prêt, qui dit prêt, dit dette, or la dette tunisienne, aujourd’hui, c’est un problème. C’est un problème qui est essentiellement hérité de la période Ben Ali et il ne faudrait pas que l’argent que l’on prête aux Tunisiens ne serve qu’à une seule chose, à savoir rembourser les intérêts de la dette qu’elle avait contractée dans l’ancien régime. »
Idem, pour Yannick Jadot, député français du groupe Les verts : « nous devons favoriser l’aide macro-financière à la Tunisie et, en même temps, nous devons – et le Parlement européen avait voté en ce sens en 2012 – revenir sur la dette odieuse de la Tunisie notamment contractée sous les années Ben Ali » déclare t-il avant d’appeler à « alléger le poids de la dette », a-t-il déclaré.
D’autres priorités
De son côté, le député du Front National Nicolas Bay affirme: « Qu’il est loin le temps où l’on se félicitait sans réserve du modèle tunisien de transition démocratique » avant d’ajouter:
« Je ne me réjouis pas de cette zone de libre-échange approfondi que vous voulez mettre en place et que je ne crois profitable ni aux Européens, ni aux Tunisiens. Contrairement à vous, je ne prêche pas que, je cite, ‘l’assistance macro-financière de l’Union devrait renforcer l’adhésion de la Tunisie aux valeurs qu’elle partage avec l’Union’.
Le député du Front National dénonce une « perpétuelle volonté d’ingérence, qui crée plus de problèmes qu’elle n’en résout ».
Du côté du député grec Lambros Fountoulis, l’aide à la Tunisie est inconcevable au vue de la situation de la Grèce: « Vous êtes vous déjà demandé comment réagiront tous les citoyens des pays du Sud, comme la Grèce, quand ils découvrent que l’Union Européenne dépense des milliards en aide aux pays tiers? » a t-il affirmé avant d’ajouter « Vous savez qu’avec une fraction de l’argent que vous offrez à la Tunisie, les sans-abri (…) auront au moins un toit sur leur tête? »
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