Vendredi 13 mai, les 28 Ministres du commerce de l’Union européenne vont se réunir à Bruxelles pour ce qui s’apparente à un Conseil décisif sur des sujets parmi les plus importants de l’agenda commercial de l’Union européenne.
Première urgence, face à la crise sidérurgique qui frappe l’Europe entière: il est plus que temps de sortir de renforcer les instruments de défense commerciale de l’Union. Depuis deux ans, la moitié des gouvernements nationaux s’oppose à un renforcement des taxes anti-dumping applicables aux produit importés depuis des pays qui pratiquent une politique commerciale agressive, au premier rang desquels la Chine. Cette situation doit cesser: quand les États-Unis n’hésitent pas à mettre en place des taxes anti-dumping punitives (de l’ordre, parfois, de 200% la valeur du produit) en conclusion de procédures expresses, l’Union européenne choisit de limiter sa capacité de sanction. Les enquêtes anti-dumping durent en moyenne 9 mois et aboutissent bien souvent à des pénalités de 15%. Les gouvernements qui persistent dans leur entêtement idéologique doivent réaliser que les régulières fermetures d’usine et autres cessations d’activités industrielles ne sont pas une fatalité mais le fruit de leur inaction. Des actes !
Tout aussi fondamental, les ministres européens vont débattre du sort à donner à l’Accord commercial UE-Canada (CETA), véritable TAFTA avant l’heure. Il semble qu’un consensus se dégage au Conseil pour que le CETA soit considéré comme un accord mixte, c’est-à-dire qu’il nécessite la ratification des parlements nationaux pour entrer en application définitive. Au-delà, il s’agira de refuser toute mise en application provisoire de l’accord avant le vote du Parlement européen, voire des parlements nationaux. Mais en plus de ces questions qui ne sont pas que procédurales, les Ministres doivent s’interroger sur le contenu de l’accord qui, à mes yeux, empiète clairement sur le droits des États à légiférer, avec sa juridiction d’exception en matière de règlement des différends investisseurs-États, ses clauses standstill et ratchet, son mécanisme de libéralisation par défaut des services. Le contexte de crise de surproduction agricole, par ailleurs, interroge sur l’opportunité de conclure un accord qui va augmenter les quotas d’importation de porc et de bœuf canadiens, sans protéger de manière complète les appellations d’origine contrôlée (AOC) françaises et européennes.
Le Conseil du vendredi 13 mai s’apparente à une nouvelle réunion de la dernière chance pour les derniers supporters du Traité transatlantique (TTIP/TAFTA) avec les États-Unis. Certains États, en dépit d’une opposition massive dans leur pays, se bercent de l’illusion que ce traité pourrait être conclu avant la fin de l’année 2016. Face à eux, je ne doute pas que la France saura faire entendre une voix forte sur un accord qui – c’est de plus en plus clair – contient beaucoup plus de risques que d’opportunités.
Enfin, après plusieurs discussions infructueuses, nous sommes nombreux à attendre du Conseil qu’il se range à la position du Parlement européen sur le dossier très emblématique des minerais de conflit. Grâce à la mobilisation de la gauche européenne, le Parlement a voté en mars dernier un rapport ambitieux qui appelait les entreprises européennes à la responsabilité dans le commerce des minerais. L’objectif: certifier l’origine des minerais utilisés, afin de s’assurer qu’ils ne servent pas à nourrir des conflits parfois sanglants.
Pour suivre la session du Conseil des ministres du Commerce, vendredi 13 mai (à partir de 10h), c’est ici: http://video.consilium.europa.eu/