Mobilisation au Parlement européen contre le dumping chinois

obs-chinePublié sur le site de l’Obs le 02/02/2016

Les principaux groupes du Parlement européen sonnent le tocsin face à l’éventualité de voir la Chine accéder, à la fin de l’année, au statut d’économie de marché au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Cette perspective, promise à Pékin à une échéance de quinze ans lors de son adhésion à l’organisation, en décembre 2001, rendrait plus difficile, voire impossible, l’imposition de mesures anti-dumping et menacerait, selon les eurodéputés, des pans entiers de l’industrie européenne.

« Accorder le statut d’économie de marché à la Chine, ce serait très dommageable pour l’économie européenne et pas réaliste politiquement », a reconnu Cecilia Malmström, commissaire européenne au Commerce, lors d’un débat organisé à Strasbourg lundi soir.

« La Commission reste déterminée à conserver un instrument anti-dumping fort tout en respectant ses engagements internationaux », a-t-elle ajouté en promettant d’ici le mois de juin une étude d’impact sur les différentes hypothèses qui s’ouvrent aux Vingt-huit.

Selon la Commission, 52 mesures antidumping s’appliquent actuellement à des produits chinois, représentant 1,38% des importations de l’Union européenne originaires de ce pays.

Elles concernent l’acier, la construction mécanique, les produits chimiques ou la céramique, des activités qui représentent 250.000 emplois directs dans les pays de l’UE.

Les exportations de la Chine vers l’Union européenne représentaient 302,4 milliards d’euros en 2014 contre 164,7 milliards d’euros vendus dans l’autre sens, selon Eurostat.

« PROTECTION COMMERCIALE »

Les taxes imposées aux produits dont le prix est jugé artificiellement bas grâce à des aides d’Etat, sont calculées à partir des prix ou des coûts constatés dans des pays « analogues ». Ce mode de calcul ne pourrait plus être appliqué si le statut d’économie de marché était accordé à la Chine.

« Nous ne pouvons pas abandonner les leviers qui nous assurent une protection commerciale », a estimé le social-démocrate allemand Bernd Lange, président de la commission du Commerce international.

C’est en son sein que sera élaborée la position du Parlement sur la proposition de la Commission européenne relative à l’évolution des relations commerciales avec la Chine.

« Il n’est pas possible que, par le biais de subventions de l’Etat, une surproduction soit écoulée sur le marché européen comme c’est le cas dans l’industrie sidérurgique », a-t-il dit.

Refusant un octroi automatique du statut à la Chine mais craignant un refus qui entraînerait une plainte de Pékin devant l’OMC, il a suggéré « une troisième option », également privilégiée par la Commission : un octroi de ce statut assorti d’exceptions négociées.

« Cette troisième voie, je n’y crois pas du tout », a dit à Reuters Franck Proust, eurodéputé UMP, en rappelant l’affaire des panneaux photovoltaïques, quand la volonté de la Commission de taxer les produits chinois, en 2013, avait divisé les européens et provoqué des menaces de représailles contre les voitures allemandes et les vins français. Un accord avec Pékin avait néanmoins été trouvé.

GUERRE COMMERCIALE ?

« Nous allons vers une guerre commerciale avec la Chine », affirme-t-il en invitant les Vingt-huit à s’y préparer en élaborant un pacte et un fonds de solidarité en prévision des inévitables mesures de représailles.

Un refus clair et net, en entraînant les deux parties sur la voie d’un contentieux devant les instances de l’OMC, serait, selon lui, la meilleure façon de gagner du temps.

Le socialiste français Emmanuel Maurel s’est également positionné pour un refus du statut.

« Ça fait quinze ans qu’on sait que le problème va se poser et on en est à imaginer des solutions dans l’urgence. La Chine n’est pas une économie de marché. L’Europe n’a pas vocation à être l’idiot du village planétaire », a-t-il affirmé lundi.

Si le climat parlementaire semble peu favorable à un octroi pur et simple du statut demandé par la Chine, les clivages sont toutefois plus nationaux que politiques.

« Nous devons signer un accord de libre-échange avec la Chine », a ainsi affirmé Daniel Dalton, un conservateur britannique qui s’est revendiqué des West-Midlands, la seule région qui a un solde commercial positif avec la Chine.

Les Etats-Unis, peu disposés à ouvrir davantage leur marché aux produits chinois, inciteraient en revanche leurs partenaires européens à la fermeté.

« Ils nous menacent d’interrompre les négociations sur le TTIP (Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement) si nous reconnaissons le statut d’économie de marché à la Chine », a dit mardi à des journalistes la socialiste française Pervenche Berès.

A retrouver sur le site de l’Obs
Crédits photo : 2016/REUTERS/China Daily (c) Reuters

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