Lundi 16 novembre dernier, l’ultime réunion de la commission spéciale TAXE du Parlement européen a été consacrée à l’audition de 11 multinationales qui avaient décliné la première invitation que nous leur avions envoyée.
Ce changement soudain de stratégie ne constitue pas un grand sacrifice à la transparence ni un risque quelconque pour ces grands groupes; et si je suis heureux que les parlementaires européens aient eu l’opportunité de cette confrontation, il ne faut pas exagérer le « signal positif » que cela représenterait.
Je retiens en effet trois limites de taille à cet événement :
1. Les multinationales concernées ont :
– refusé de venir témoigner lorsque le rapport de la commission spéciale pouvait encore être amendé,
– accepté seulement une fois le rapport voté par la commission …
2. En second lieu, elles ont agi sous la pression de se voir retirer leur accréditation en tant que lobbyistes, et donc de se voir priver d’accès au Parlement européen. En somme il a fallu un début de menace pour qu’elles acceptent seulement d’échanger sur un sujet dont elles sont la pièce maîtresse.
3. Elles n’ont apporté, au cours des échanges, aucun éclairage substantiel sur leurs pratiques de planification fiscale agressive.
Par conséquent, contrairement à ce que quelques titres un peu hâtifs peuvent laisser entendre, les multinationales n’ont pas « montré patte blanche ». Elles ont au contraire accepté de faire de la figuration devant le Parlement européen (qui aurait eu des moyens plus efficaces avec une commission d’enquête), afin de minimiser leur risque de réputation.
Leurs pratiques, quoique de plus en plus cernées par les régulations nationales, sont aussi de plus en plus sophistiquées. Les profits sont massivement déplacés du pays où ils sont générés, vers des juridictions fiscales non coopératives comme les îles Caïmans ou les Bermudes, via certains Etats de l’Union européenne : Luxembourg, Irlande, Pays-bas.
En exploitant les failles qui existent entre les différentes lois nationales, les groupes s’estiment dans leur droit et ne se privent pas de garder leurs explications pour eux, même quand cela touche leurs salariés, comme l’illustre mon échange avec la Directrice internationale Fiscalité de McDonald’s.