La Pologne vire très à droite : après une première victoire aux élections présidentielles, le PiS a écrasé tous ses adversaires aux élections législatives, et notamment la gauche, totalement absente du nouveau parlement polonais. A l’instar du Front national en France, du FPÖ autrichien ou du Parti du peuple danois, le PiS est une formation qui maquille son discours conservateur, nationaliste et xénophobe de préoccupations sociales. Il se veut proche du peuple et s’adresse directement aux abandonnés de la croissance en leur promettant à la fois l’avènement d’un État social et un renouvellement des élites. En cela, il profite de l’inexistence de la gauche polonaise et de l’usure de la génération Solidarnosc.
Par ailleurs, il s’agit d’une énième victoire d’un parti critique des réponses que l’Union européenne a apportées à la crise économique ces dernières années. Le très eurosceptique PiS, dont le programme fait part belle au rejet de l’immigration et à un atlantisme forcené, a également surfé sur l’incapacité de l’Union à gérer de manière convaincante la crise des réfugiés et la crise ukrainienne. Sur notre continent, les rendez-vous électoraux se suivent et se ressemblent, à tel point qu’on peine à se souvenir de la dernière victoire éclatante d’un parti favorable à l’Europe libérale actuelle. La Pologne, pour qui l’Union européenne a longtemps été synonyme d’espoir, qui a bénéficié de milliards d’euros de fonds structurels et qui a envoyé son ancien premier ministre à la tête du Conseil européen, ne déroge pas à la règle. Le succès électoral du PiS interroge encore une fois l’Union européenne sur son déficit social et démocratique, qui pourrait finalement la conduire à sa perte.
En effet, vingt-cinq ans après la chute du mur de Berlin, il est à parier que l’élection du nouveau gouvernement polonais contribuera à élargir le fossé grandissant entre l’Ouest et l’Est de l’Europe. La Pologne risque de constituer un allié de poids pour la Hongrie de Viktor Orban, mais également pour les conservateurs britanniques, avec lesquels le PiS est allié au Parlement européen. M. Cameron pourrait ainsi bénéficier d’une plus grande latitude pour tenter de cantonner l’Union européenne au nain politique que les citoyens européens rejettent : une sorte de grand marché mou, dépourvu de responsabilité démocratique, et sans harmonie sociale ou fiscale.
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