J’ai présenté aujourd’hui au sein du groupe social-démocrate de la commission spéciale TAXE le système de rescrits fiscaux français et l’état de la lutte contre l’optimisation fiscale en France. La France est volontariste, elle l’a montré à plusieurs reprises, mais elle s’arrête au milieu du gué.
L’optimisation et l’évasion fiscale coûtent entre 60 et 80 milliards d’euros par an aux finances publiques françaises, soit, en fourchette haute, presque la totalité du déficit public français en 2014. Or de nombreux dispositifs sont encore massivement utilisés par les grandes entreprises, étrangères et françaises, pour échapper à l’impôt sur les sociétés. La justice fiscale concerne aussi les entreprises : les groupes du CAC 40 réussissent à réduire leur taux d’impôt sur les sociétés à 8% ! J’ai présenté à la commission TAXE les dispositifs dont abusent certaines sociétés pour parvenir à ce résultat. L’endettement est le vecteur principal de l’optimisation en France : les grands groupes profitent de leur faciliter à s’endetter dans le seul but de retirer le montant des intérêts de leur impôt sur les sociétés. De plus, le droit français est toujours inadapté à la technicité et la complexité des montages : il ne permet pas de vérifier les prix de transfert (les prix que facture un groupe en interne) que les groupes utilisent pour localiser artificiellement des pertes en France.
La France a encore beaucoup de chemin à parcourir pour se mettre son action en adéquation avec ses prises de position sur la scène internationale. Mais nos échanges au sein de la commission TAXE ont démontré aussi la nécessité d’harmoniser au moins la base d’imposition des sociétés ! Assurer l’égalité de tous les contribuables devant les impôts, faire cesser la course au moins-disant fiscal, voilà un devoir élémentaire de l’Union européenne. Il faut donc pouvoir connaître les activités des multinationales dans chaque Etat, y compris les paradis fiscaux.
La droite européenne mène un double-jeu. Alors que le PPE reconnaît au sein de la commission spéciale TAXE, reconnaît la nécessité de ce « reporting pays par pays », les élus de droite s’apprêtent à voter contre cette mesure à Strasbourg la semaine prochaine. Ma conviction profonde est que certains parlementaires doivent s’affranchir des intérêts des actionnaires qui demeurent le véritable frein au reporting pays par pays.
Emmanuel MAUREL, député européen
Membre de la commission spéciale TAXE du Parlement européen
Porte-parole français du groupe S&D pour la commission TAXE