Emmanuel Maurel, député européen et conseiller régional d’Ile-de-France, réagit vivement aux résultats du second tour des élections départementales et à la déclaration de Manuel Valls. Pour lui, « il faut faire preuve de lucidité et avoir l’intelligence de changer de politique ».
Comment réagissezvous à la défaite du Parti socialiste ?
Emmanuel Maurel : Je suis en colère, je pense aux conseillers généraux et aux militants, qui avaient un bon bilan et un beau projet départemental, et qui ont été sacrifiés sur l’autel d’une politique nationale qu’ils n’ont pas choisie. C’est la troisième défaite d’ampleur consécutive. Il ne faut pas la minimiser ou la relativiser. Pourtant le message envoyé est : « On a perdu, mais on va continuer comme avant. » Cette obstination à poursuivre une politique qui ne produit pas de résultats et qui ne convainc même pas dans notre propre camp me paraît au mieux navrante au pire irresponsable.
Sur quelles bases, un rassemblement de la gauche est-il possible ?
Tout le monde va en appeler au rassemblement de la gauche. La difficulté, c’est qu’on ne la rassemble pas sur une ligne qui la divise et la fracture. On ne peut pas demander aux différentes forces politiques et à notre électorat de se rassembler juste parce qu’il y a le FN en face. Il y a un combat nécessaire contre l’extrême droite, mais ce n’est pas ça qui fera revenir notre électorat.
Qu’avezvous pensé de l’intervention de Manuel Valls ?
D’abord, il y a cette façon de ramener tout à lui, de parler sans cesse de lui, qui est un problème. Ensuite, il est quand même dans le déni quand il affirme que les indicateurs sont au vert et que la situation repart. Les électeurs ne s’en rendent pas compte. Il faut faire preuve de lucidité
Si une défaite d’ampleur aux départementales ne produit aucun effet sur la ligne du gouvernement, n’est ce pas la preuve que rien ne va bouger ?
On a l’impression que le hollandisme, se résume à : « C’est mieux que si c’était pire ». A chaque défaite électorale ou à chaque revers économique, on nous explique que ça pourrait être pire, qu’il faut attendre, et que ça va s’améliorer. Si on veut être à la hauteur des enjeux, il faut s’arrêter un moment, regarder la situation avec lucidité, prendre langue avec nos partenaires, et oser une inflexion de la politique nationale et européenne. Est ce que l’exécutif en aura le courage ? Nous sommes en tout cas un certain nombre à le vouloir. S’il n’y a pas d’aspiration à ce sursaut, on va vers une situation de blocage qui sera préjudiciable à François Hollande dans deux ans.
Propos recueillis par Nicolas Chapuis
Article publié sur le site Le Monde.fr
Crédits photos : ALAIN JOCARD / AFP