Article paru sur paris-normandie.fr. Cogitation. Autour de Christian Paul et Emmanuel Maurel, députés PS, le courant Vive la gauche 76 réveille le débat.
Les contestataires socialistes ne vont pas se taire. L’appel à l’unité nationale après les attentats n’a pas changé la position des frondeurs sur le fond. « Le débat au sein de la gauche doit continuer », invite David Fontaine, secrétaire de la section du PS de Saint-Etienne-du-Rouvray, ville résolument à gauche, en accueillant mercredi soir 150 personnes venues de l’agglomération et de plus loin, autour de deux figures de l’aile gauche du parti au poing et à la rose.
Le député de la Nièvre Christian Paul (membre du collectif Vive la gauche) et l’eurodéputé Emmanuel Maurel (leader du courant Maintenant la gauche) ont fait le déplacement en train pour dire qu’il est plus que jamais nécessaire d’être frondeur, même après le 11 janvier.
« La controverse a toute sa place. Surtout pas de silence dans les rangs ! Sinon ce serait un contresens », annonce Emmanuel Maurel, qui appelle « à être à la hauteur de l’exigence de l’élan ».
L’emploi d’abord
Après l’électrochoc des attentats, cette classique cérémonie de vœux a servi à nourrir le dialogue entre élus et électeurs, ceux qui fréquentent les arcanes du pouvoir et ceux qui se coltinent le quotidien. Avec ou sans emploi. C’est toute la question.
« Le sursaut républicain c’est ne pas rompre avec la solidarité. La priorité ce n’est pas réduire les déficits publics. C’est la lutte contre le chômage qui prime », assène l’eurodéputé. « Et quand on est en récession il faut soutenir l’investissement public. Voilà notre premier désaccord. Pour faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’Etat, il faut donner du travail ! »
Des questions fusent : « On entend beaucoup de parler de moyens pour la sécurité, mais pas de discours volontaire pour l’école, la justice. Et si on réinvitait le vote des étrangers dans le débat ? Et la réforme fiscale ? »
Toujours reviennent ces promesses oubliées de 2012. « Nous ne voulons pas diviser mais reformuler un projet », indique le jeune patron du PS stéphanais proche de Martine Aubry, vous l’avez compris.
Ces parlementaires rebelles qui veulent « assumer des désaccords dans la fraternité », ont écouté les déceptions et les doutes de militants qui se demandent « que faire après ces millions de gens descendus dans la rue » veulent comprendre « ceux qui n’ont pas voulu, pas osé ou pas trouvé leur place dans les défilés ».
Un plan République
Signataire de l’appel des 100 au printemps dernier, Christian Paul invite à « un plan République. Laïcité ce n’est pas le même programme que compétitivité ! »
À l’épreuve du pouvoir, le PS a enchaîné les claques. Municipales, européennes… Mais quelles réponses donner ? « Nous marquons une distance critique en votre nom. Inspirons-nous de l’esprit du 11 janvier. Si notre électorat décroche, c’est parce que le CICE ce n’était pas notre engagement. Ce n’est pas dans une ambiance de réduction de déficits qu’on aura la réponse aux questions qui nous troublent aujourd’hui. »
Ceux qui résistent de l’intérieur et ne veulent pas faire sécession pensent déjà au prochain congrès à Poitiers en juin. « Il s’agit de réorienter le quinquennat en rassemblant. Une alternative est possible. Nous allons débattre en votre nom. Le sursaut républicain c’est renouer avec la souveraineté populaire qui en a pris en coup » assure Emmanuel Maurel. Qui avoue au passage : « Bon moi je n’ai pas voté pour Juncker comme le demandait Hollande, mais personne ne m’a rien dit… »
Les jours qui viennent seront tendus à l’assemblée. « Nous n’avons pas été élus pour organiser la régression des droits des salariés », prévient Christian Paul avant l’examen de la loi Macron, où les députés frondeurs présenteront une série d’amendements pour « empêcher une déconstruction le droit du travail ». Jusqu’où ira le débat fraternel ?
SOPHIE BOGATAY
Retrouvez cet article sur Parisnormandie.fr