Nous ne sommes pas de fanatiques de la Vème République, loin s’en faut. Un exécutif hypertrophié, un parlement muselé, une excessive personnalisation du pouvoir : les institutions d’aujourd’hui méritent d’être profondément transformées. En attendant ce changement nécessaire, que demander à nos gouvernants? A tout le moins qu’ils occupent leurs fonctions avec un minimum de dignité. En quelques mois, Nicolas Sarkozy a refroidi les enthousiasmes des plus fervents supporters de la monarchie républicaine. Est-ce là la « ruse de la raison »? Le chef de l’État qui parachèverait l’œuvre de Chirac en discréditant définitivement la fonction de président « à la française »?
Car avec Sarkozy, il y a bien un saut qualitatif. Étalage de la vie privée, goût revendiqué pour le luxe, fascination pour l’argent-roi, rien ne nous est épargné. Quels que soient les défauts de ces prédécesseurs, aucun n’aura versé dans un tel exhibitionnisme, aucun n’aura sombré avec autant de virtuosité dans la vulgarité et le racolage.
Le plus dramatique, c’est évidemment de constater que nombre de médias lui emboitent le pas avec une certaine délectation. On ne compte plus les « unes » sur madame Bruni. Un nouveau pas est franchi aujourd’hui. Qu’un hebdomadaire « sérieux » comme le Nouvel Observateur, en effet, choisisse de publier un supposé texto du président adressé à son ex-femme, voilà qui en dit long sur l’évolution de la presse française. Même si Sarkozy a fait de sa vie intime une affaire publique (regrettons au passage qu’il ne soit pas le seul à pratiquer ce genre de confidences), faut-il pour autant entrer dans son jeu, au risque de mettre la politique au niveau où certains rêvent de la voir s’installer : dans le caniveau.
Car les diverses « révélations » qu’on nous inflige créent comme un rideau de fumée qui masque la réalité de ce pays : une politique économique calamiteuse, des inégalités qui se creusent, des Français qui s’appauvrissent, etc… A l’occasion des élections municipales et cantonales, sachons rappeler les vrais enjeux du moment.