Le traité dit simplifié agite modérément le landerneau. C’est normal puisque, selon les esprits informés, la messe est dite. Sarkozy avait annoncé qu’il ne recourrait pas au référendum. Ségolène Royal au contraire avait défendu l’idée selon laquelle le passage devant le peuple souverain était une étape obligée. Elle se range aujourd’hui à l’avis du chef de l’État, et avec elle, semble-t-il, la majorité du PS. La presse est évidemment au diapason : les électeurs sont parfois si imprévisibles!
Et puis, ajoutent en chœur les spécialistes, le texte simplifié est si compliqué! Les citoyens pourraient s’y perdre, et voter avec leurs pieds, comme lors du funeste 29 mai. Autant laisser les gens sérieux s’occuper du bonheur de tous. En votant tranquillement pour un document qui diffère pourtant peu du texte rejeté par près de 55% des Français il y a deux ans. Car, tout simplifié qu’il est, le compromis de Lisbonne se contente de modifier à la marge le TCE.
Le traité simplifié, c’est encore Giscard qui en parle le mieux. L’ancien président de la convention européenne, vexé qu’on puisse faire avaliser un traité après avoir refusé celui dont il était le principal artisan, indique dans Le Monde à quel point les deux textes sont similaires. Il faut lire cette intéressante tribune. VGE explique ainsi que « Le traité de Lisbonne se présente comme un catalogue d’amendements aux traités antérieurs. Il est illisible pour les citoyens, qui doivent constamment se reporter aux textes des traités de Rome et de Maastricht, auxquels s’appliquent ces amendements. » Voilà pour la forme.
Sur le fond en revanche, l’Ex indique que « les propositions institutionnelles du traité constitutionnel se retrouvent intégralement dans le traité de Lisbonne, mais dans un ordre différent, et insérées dans les traités antérieurs. ». Nous voilà rassurés : tout y est , mais dans le désordre.
Un peu vachard, Giscard indique que les demandes formulées par les partisans français du non ont fait l’objet de « satisfaction de politesse plus que de modification substantielle ». Ainsi, la concurrence libre et non faussée ne figure pas… à la même place. Immense victoire de Sarkozy, qui a su prendre en compte les aspirations de son peuple rebelle!
Plus sérieusement, ce qui frappe dans ce nouveau texte, c’est à quel point il révèle la grille d’analyse des dirigeants européens relativement aux non français et hollandais. Plutôt que d’y voir une protestation contre l’absence de garanties sociales et démocratiques dans la construction européenne, ils y ont préféré y déceler une bouffée irrationnelle d’euroscepticisme. Ainsi, les rédacteurs ont enlevé du texte toute référence aux emblèmes de l’Union (drapeau, devise, hymne) : comme si c’était là ce qui gênait les peuples !