Si Sarkozy était scénariste, il y a fort à parier qu’il intitulerait son nouvel opus : « Traité constitutionnel européen : la revanche ! ».
Les français et les hollandais, mauvais coucheurs de l’Union européenne, avaient eu l’impudence de rejeter un texte célébré par toutes les élites du continent. A peine élu, le président de la République s’est échiné à remettre l’ouvrage sur le métier. Pour que la France, « au ban des nations d’Europe », retrouve enfin son rang, il fallait, au plus vite, réécrire un texte « simplifié ».
Celles et ceux qui auront le temps et le courage (il en faut beaucoup) de jeter un œil sur le document de compromis issu de Lisbonne constateront qu’en matière de « simplification », les dirigeants de l’Union ont des progrès à faire. « Simplifié », le nouveau traité n’en a que le nom. Il est en effet, à l’instar du précédent, d’une incroyable complexité. Un argument « démagogique », disent les savants et les experts, qui savent ce qui est bon pour le peuple. Pourtant, le caractère illisible des documents communautaires n’en finit pas de poser problème.
La plupart des Constitutions démocratiques modernes sont accessibles au plus grand nombre. Voyez la Loi fondamentale allemande, la constitution américaine ou le texte de la Vème République française : un citoyen, même rétif au langage juridique, comprendra à peu près comment les institutions de son pays fonctionnent, quelles sont les libertés fondamentales qui y sont protégées, comment la responsabilité des dirigeants peut être engagée.
Ce n’est pas le cas pour l’Europe. Construction inédite, fruit de longues et laborieuses tractations, l’Union Européenne est certes un objet politique non identifié. La difficulté à mettre d’accord 27 États-nations peut expliquer le recours à des solutions techniques parfois alambiquées. Mais rien ne saurait justifier le règne généralisé de l’opacité. Et rien ne peut expliquer que des institutions non élues (la Commission, ou la Banque centrale Européenne par exemple) puissent imposer leur loi au Parlement issu du suffrage universel. Au cœur du débat sur l’Union européenne, il y a la question démocratique.
C’est la raison pour laquelle le refus du président de la République française de recourir au référendum sur le traité simplifié est tout bonnement un déni de démocratie. Ce que le peuple a défait en 2005, seul le peuple le refait ou le défait à nouveau. Aucun argument sérieux ne peut être opposé à ce principe fondamental.