Monopoly entre amis

La semaine dernière, j’évoquais en passant l’incroyable collusion entre le pouvoir en place et le grand patronat français.
Cette proximité n’est ni un scoop, ni, hélas, une nouveauté sous la Vème République. Mais avec l’ex maire de Neuilly, il est indéniable qu’un cap a été franchi. Sarkozy adore parader aux côtés de ces amis patrons, dont beaucoup habitent dans la ville qu’il a longtemps administrée. Du yacht au large de Malte aux vacances américaines offertes par des riches industriels, le président aime à se montrer en compagnie de généreux donateurs.

Arnaud Lagardère (« mon frère », dit de lui Sarko), Martin Bouygues (« l’ami de toujours »), Vincent Bolloré, Bernard Arnault : les copains du président sont aussi ceux qui contrôlent des secteurs clés de l’industrie française. Télécommunications, médias, énergie, BTP, la palette des activités des groupes qu’ils dirigent est large.

Prenons un exemple, le moins connu des quatre. Le groupe Bolloré, tentaculaire, ne se contente pas de prospérer dans l’industrie, le transport et la logistique, la plantation. Il s’est lancé, il y a peu, dans les médias et la communication. Chaîne de télé « Direct 8 », quotidiens gratuits « Direct soir » et « Matin Plus », des parts importantes dans la SFP. Bolloré produit de l’information. C’est utile. Bolloré Telecom a besoin de fréquences : le gouvernement le lui accorde. Bolloré a un yacht : il le prête au président de la République, qui a besoin des journaux pour populariser sa politique mais qui peut en échange donner de bons coups de main.

Car le problème, c’est bien que les groupes amis sont en affaires avec la puissance publique.  Lagardère, on le sait depuis quelques semaines, a fait une belle affaire en vendant ses actions d’EADS à la caisse des dépôts et consignations, qui a perdu beaucoup d’argent. Dans « le Journal du dimanche », qu’il possède,  il se défend et mouille Villepin, qui déteste Sarkozy.

Mieux encore : Bouygues, à qui l’État a cédé ses parts dans Alstom, va entrer dans le capital d’Areva, qui contrôle la filière nucléaire française. Madame Lagarde, ministre de l’économie et des finances, interrogée hier à l’Assemblée Nationale, ne trouve pas grand chose à redire. Les centrales nucléaires au privé? Il faut donner à l’entreprise « les moyens de financer son développement ». François Brottes, député PS, a fustigé ce « Monopoly entre amis ». La formule est plaisante. La réalité l’est moins.

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