On ne prête pas suffisamment attention aux travaux du Conseil économique et social. Cet organisme consultatif, reconnu par la Constitution, souffre d’une image un peu ringarde. Perçu comme une voie de garage réservée aux partenaires sociaux à la retraite et autres responsables politiques en attente d’un nouveau mandat
, il joue cependant un rôle non négligeable dans le débat public.
En témoigne son dernier avis sur la question du dialogue social : à une très nette majorité, le CES se prononce en faveur d’une réforme en profondeur de notre démocratie sociale.
Les principales conclusions du texte adopté proposent une véritable révolution.
La refonte de la représentativité syndicale (qui serait désormais fixée sur les résultats d’un ou plusieurs scrutins ouverts à l’ensemble des salariés) est évidemment au cœur du sujet. Cette revendication, portée par des syndicats émergents (UNSA, Solidaires) mais aussi par des grosses centrales (CGT, CFDT) est fondée sur un argument de bon sens : depuis 1966 (date à laquelle 5 syndicats ont été reconnus comme représentatifs), le paysage social a été modifié en profondeur, les rapports de forces entre syndicats aussi : il paraît aberrant de ne pas en tenir compte.
Autre principe retenu par l’avis du CES : ne devraient être valides que les accords collectifs signés par des organisations syndicales représentant la majorité des salariés. En gros, il est temps que les principes de la démocratie politique (en l’occurrence la légitimité de la majorité issue des urnes) s’applique également sur le terrain social.
Enfin, le CES insiste sur deux autres points : d’abord, il propose que la représentation syndicale et la négociation collective soient ouvertes à tous les salariés des petites et moyennes entreprises. Ensuite, il reconnaît le bien fondé du financement public des organisations syndicales (en complément des cotisations des adhérents). Ce n’est pas rien !
On le voit : le texte du CES va bien plus loin que la proposition du gouvernement actuellement en discussion à l’Assemblée. Celle-ci vise simplement à ce que chaque décision législative ayant trait au droit du travail soit précédée d’une concertation sociale obligatoire. Cette réponse n’est pas à la hauteur de l’enjeu. Il s’agit en effet de promouvoir cette revendication essentielle : la démocratie ne s’arrête pas à la porte du lieu de travail.