Vous êtes remonté contre les hommes politiques… Pourquoi ?
Emmanuel Todd. Les politiques
s’interdisent de parler du principal problème qui concerne les gens
: notre système économique. Or, le libre-échange, c’est ce qui produit un tiers-monde dans les pays développés et détruit notre industrie. Les politiques ne parlent que de choses qui n’intéressent pas les gens. Cela produit un immense désintérêt.
Sont-ils les seuls fautifs ?
L’époque est au repli sur soi. Il y a une perte de sens de l’action collective dans tous les domaines. Même les syndicats se décomposent. C’est dans ce genre de monde incertain que peuvent apparaître ces « fantômes politiques » comme Nicolas Sarkozy ou Ségolène Royal, deux candidats du vide.
Pourquoi des « fantômes » ?
Parce qu’ils n’incarnent plus rien. Les hommes politiques d’autrefois incarnaient des idéologies plus grandes qu’eux-mêmes. Maintenant, il n’y a plus rien à incarner. Et s’il n’y a plus rien à incarner, que va-t-on regarder chez les hommes politiques ? Leur visage, leur vie personnelle, leur style…
Vous pensez à Ségolène Royal…
Ségolène Royal, j’ai l’impression qu’elle a été fabriquée par le vide et qu’elle n’est pas vraiment responsable de ce qu’elle est aujourd’hui. Un grand hebdomadaire et des sondages d’opinion, à eux seuls, tentent de faire croire qu’elle existe… Ils l’ont désignée sans programme. C’est une sorte de putsch. Si c’est elle qui est désignée, on pourra dire que les sondeurs on fait une OPA sur le PS. En tout cas, le Parti socialiste donne l’image d’une décomposition accélérée. L’idée de pouvoir simplement s’inscrire sur Internet pour décrocher le droit de participer à la désignation du candidat est une forme de destruction du parti politique au sens où on l’entendait.